Fédération Alsace bilingue-Verband zweisprachiges Elsass

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Discours à l’occasion de la remise du Prix Eugène Philipps 2023 / Rede zur Verleihung des Eugen-Philipps-Preises 2023

Le discours est disponible sur ce LIEN–  Die Rede ist unter diesem LINK zu lesen  

A l’occasion de la fête de la langue régionale d’Alsace qu’elle organisait samedi 7 octobre 2023, la fédération Alsace a remis le Prix Eugène Philipps, nouvellement crée, à Jean-Marie Woehrling et à son épouse Jacqueline. La manifestation a été heureusement soulignée par des contributions de Serge Rieger, du théâtre Saint-Nicolas de Haguenau et de nombreux amis des récipiendaires.

Le Prix Eugène Philipps à Jacqueline Woehrling   

Le Prix Eugène Phlipps à Jean-Marie Woehrling   

Voici le discours que le président de la fédération a tenu en prélude à la remise du prix.

Chère Jacqueline, cher Jean-Marie, la fédération Alsace bilingue – Verband zweisprachiges Elsass est heureuse de vous décerner conjointement le Prix Eugène Philipps pour votre fort, tenace et bénévole engagement en faveur de la défense et de l’illustration de la langue et de la culture dites régionales.

Conjointement, parce que ce que vous avez accompli n’aurait sans doute pas été possible si vous ne vous étiez pas soutenus mutuellement. 

Vous avez connu deux Alsace et en vivez une troisième.

La première Alsace est celle de l’après-guerre au climat lourd chargé d’hostilités objectives ou subjectives à l’égard de l’identité alsacienne et en particulier de sa part allemande, tant linguistique que culturelle. Sortant de l’annexion au régime nazi, un véritable Anschluss au IIIe Reich, avec tout ce que cela représente de malheurs et d’animosité, en particulier d’hostilité à l’égard de la part française de notre identité, les Alsaciens traumatisés ont courbé l’échine et ont surcompensé leur mal-être en recherchant une autre version de soi-même. Les tenants du monolinguisme français ont évidemment mis à profit cette situation pour imposer leur modèle et mettre en œuvre après-guerre ce qui leur avait échappé avant celle-ci. Les interdits prononcés contre la langue allemande sont prégnants. La route du déclin de la part germanophone, y compris dialectale, de l’identité linguistique alsacienne est tracée. En ce temps toute revendication en faveur du bilinguisme est immédiatement étouffée. Mais des pans entiers de ce qui a fait l’Alsace existent encore. Cette première Alsace, vous l’avez sans doute davantage subie, comme beaucoup d’autres, que voulue, sans doute sans toujours bien saisir ce qui se tramait, peut-être même déchiré entre deux courants contraires, aimer l’un, sans désaimer l’autre.

La deuxième Alsace est celle de la renaissance culturelle alsacienne. C’est l’époque de la remise en question de l’ordre établi en général et de l’alsacien en particulier. Les générations nouvelles rompent avec les précédentes et proposent une nouvelle lecture du monde, des gens et des choses. À vrai dire, ils tentent de rompre. C’est l’époque du début de votre engagement, en compagnie d’une pléiade d’acteurs et/ou d’activistes de la culture alsacienne. Citons Weckmann, Philipps, Finck, Winter, Dentinger, Schittly, Katz, Muller, Matzen, Reff, Eglès, Engel, Ehni, Keppy, Ungerer, La Manivelle, Stauffer, Sorg, Hartweg, Vogler, Tabouret-Keller, Weiss, le folk de la rue des dentelles, Guntz, Graff, Urban, Moster, Steiber, Deyon, Dammert, Jenny, Schaffner, Scherb, Wittmann, Schwengler, Meyer, Goldstein, Chaudeur, Brumbt, die SGEN-CFDT, Holderith, le FEC, Goetschy, Cronenberger, Froehlicher, Huber, Kretz, Lienhard, Lux, Martin, Matter, Morgenthaler, Niedermeyer, Peter, Schleef, Stirnweiss, Trouillet, Troxler, Zeter, Sarbacher, Winstein, ABCM et Jean Petit…. La place nous manque pour en citer nombre d’autres.

Nous sommes dans les années 70, 80, 90 du siècle précédent.  C’est l’époque où la société alsacienne était à nouveau quelque peu traversée par l’idée d’Alsace.  C’est l’époque d’avancée sur le terrain de l’enseignement et des médias, certes parcimonieux, mais qui redonnaient espoir et renforçaient l’engagement, malgré les régressions. Cette deuxième Alsace, vous en avez été de brillants et constants acteurs.

La troisième Alsace enfin est celle des années 2000. Des pans entiers de ce qui a fait l’Alsace ont disparu ou végètent. C’est l’époque d’une nouvelle génération, d’une génération qui, la reproduction du modèle portant ses fruits,  n’a plus qu’une vague idée de l’Alsace d’avant et qui, étant de plus en plus alignée, ne se pose plus la question de l’Alsace, c’est-à-dire celle d’une Alsace qui pourrait être autre, en réalité elle-même dans la confluence des cultures française et allemande. Certes, le pire n’est jamais sûr, mais le contexte politico-linguistique français ne prête pas à l’enthousiasme. Cette troisième Alsace vous a vu tenir le cap, malgré un certain désenchantement, et même renforcer votre engagement.

Cher Jean-Marie, nous tous qui sommes rassemblés aujourd’hui pour te remettre le Prix Eugène Philipps te savons gré d’avoir survécu à la première, d’avoir apporté une contribution majeure à la seconde et enfin de ne pas avoir jeté le manche après la cognée lors de la présente. Tu as apporté maints concepts, tant philosophiques que juridiques à notre réflexion. Ta culture du sujet qui nous préoccupe est non seulement immense, elle dépasse les frontières de l’Alsace. Nous te savons reconnu et consulté dans tout l’espace des revendications linguistiques régionales françaises et bien au-delà. Tu n’es pas le meilleur d’entre nous, nous sommes tous bons (sourire), tu es le premier d’entre nous. Puisses-tu le rester encore longtemps.

Chère Jacqueline, nous tous qui sommes rassemblés aujourd’hui pour te remettre le Prix Eugène Philipps te remercions particulièrement pour la part de féminité que tu as apportée à notre combat, en particulier au temps des ouvertures des premières classes ABCM-Zweisprachigkeit, et pour le grain de sel que tu sais mettre à nos débats, en particulier lors des conférences du centre culturel alsacien. Nous comptons sur toi aujourd’hui comme demain.

Merci enfin à tous les deux du souci que vous avez de transmettre le flambeau et d’avoir déjà su intégrer une relève à vos divers comités.

Pierre Klein, président de la fédération Alsace bilingue

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Liebe Jacqueline, lieber Jean-Marie, der Verband zweisprachiges Elsass – Fédération Alsace bilingue – Verband zweisprachiges Elsass freut sich, euch gemeinsam den Eugen-Philipps-Preis für euer starkes, beharrliches und ehrenamtliches Engagement für die Verteidigung und Veranschaulichung der sogenannten Regionalsprache und -kultur zu verleihen.

Gemeinsam, weil das, was ihr erreicht habt, zweifellos nicht möglich gewesen wäre, wenn ihr euch nicht gegenseitig unterstützt hättet.

 Ihr habt zwei Elsass erlebt und erlebt nun ein drittes.

Das erste Elsass war das der Nachkriegszeit, in dem ein schweres Klima herrschte, das von objektiven und subjektiven Feindseligkeiten gegenüber der elsässischen Identität und insbesondere ihrem deutschen Anteil, sowohl sprachlich als auch kulturell, geprägt war. Nach der Annexion durch das Naziregime, einem regelrechten Anschluss an das Dritte Reich, mit all den damit verbundenen Unglücken und Animositäten, insbesondere der Feindseligkeit gegenüber dem französischen Teil unserer Identität, krümmten sich die traumatisierten Elsässer und überkompensierten ihr Unbehagen, indem sie nach einer anderen Version ihrer selbst suchten. Die Befürworter der französischen Einsprachigkeit nutzten diese Situation natürlich aus, um ihr Modell durchzusetzen und nach dem Krieg das umzusetzen, was ihnen vor dem Krieg verwehrt geblieben war. Die Verbote, die gegen die deutsche Sprache ausgesprochen wurden, sind prägnant. Der Weg zum Niedergang des deutschsprachigen Teils, einschließlich des Dialekts, der elsässischen Sprachidentität ist vorgezeichnet. In dieser Zeit wird jede Forderung nach Zweisprachigkeit sofort erstickt. Aber große Teile dessen, was das Elsass ausgemacht hat, existieren immer noch. Dieses erste Elsass habt ihr wahrscheinlich, zusammen mit vielen anderen; mehr erlitten als gewollt, ohne immer genau zu verstehen, was vor sich ging, vielleicht wart ihr sogar zwischen zwei gegensätzlichen Strömungen hin- und hergerissen: das eine zu lieben, ohne das andere zu entlieben.

Das zweite Elsass ist das der Zeit, die als kulturelle Renaissance des Elsass bezeichnet wurde. Es ist die Zeit, in der die etablierte Ordnung im Allgemeinen und die elsässische Sprache im Besonderen in Frage gestellt werden. Die neuen Generationen brechen mit den vorherigen und bieten eine neue Lesart der Welt, der Menschen und der Dinge an. Um genau zu sein, versuchen sie zu brechen. Es ist die Zeit, in der Ihr Engagement beginnt, zusammen mit einer ganzen Schar von Akteuren und/oder Aktivisten der elsässischen Kultur. Zu nennen sind Weckmann, Philipps, Finck, Winter, Dentinger, Schittly, Katz, Muller, Matzen, Reff, Eglès, Engel, Ehni, Keppy, Ungerer, La Manivelle, Stauffer, Sorg, Hartweg, Vogler, Tabouret-Keller, Weiss, le folk de la rue des dentelles, Guntz, Graff, Urban, Moster, Steiber, Deyon, Dammert, Jenny, Schaffner, Scherb, Wittmann, Schwengler, Meyer, Goldstein, Chaudeur, Brumbt, die SGEN-CFDT, Holderith, das FEC, Goetschy, Cronenberger, Froehlicher, Huber, Kretz, Lienhard Lux, Martin, Matter, Morgenthaler, Niedermeyer, Peter, Schleef, Stirnweiss Trouillet, Troxler, Zeter, Sarbacher, Winstein, ABCM und Jean Petit…. Der Platz reicht nicht aus, um noch viele weitere zu nennen.

Wir befinden uns in den 70er, 80er und 90er Jahren des vorigen Jahrhunderts.  Es ist die Zeit, in der die elsässische Gesellschaft wieder einigermaßen von der Idee des Elsass durchdrungen war.  Es ist die Zeit der Fortschritte auf dem Gebiet der Bildung und der Medien, die zwar sparsam waren, aber trotz der Rückschritte neue Hoffnung gaben und das Engagement stärkten. Während dieses zweiten Elsass habt ihr euch als brillante und beständige Aktivisten erwiesen.

Das dritte Elsass ist schließlich, das der 2000er Jahre. Ganze Teile dessen, was das Elsass ausgemacht hat, sind verschwunden oder vegetieren vor sich hin. Es ist die Zeit einer neuen Generation, einer Generation, die, da die Reproduktion des Modells Früchte trägt, nur noch eine vage Vorstellung vom früheren Elsass hat und sich, da sie immer mehr angeglichen wird, nicht mehr die Frage nach dem Elsass stellt, d.h. nach einem Elsass, das anders sein könnte, einem Elsass das in Wirklichkeit nur im Zusammenfluss der französischen und der deutschen Kultur besteht. Sicherlich ist das Schlimmste nie sicher, aber der politisch-sprachliche Kontext in Frankreich lädt nicht gerade zum Enthusiasmus ein. Während dieses dritten Elsass haben wir gesehen, wie ihr trotz einer gewissen Ernüchterung, Kurs gehalten und Ihr Engagement sogar noch verstärkt habt.

Lieber Jean-Marie, wir alle, die wir heute hier versammelt sind, um dir den Eugene-Philipps-Preis zu verleihen, sind dir dankbar, dass du das erste Elsass überlebt hast, einen wichtigen Beitrag zum zweiten geleistet hast und in diesem Fall die Flinte nicht ins Korn geworfen hast. Du hast viele Konzepte, sowohl philosophische als auch juristische, in unsere Überlegungen eingebracht. Dein Wissen über das Thema, das uns beschäftigt ist nicht nur immens, sondern reicht weit über die Grenzen des Elsass hinaus. Wir wissen, dass du im gesamten Raum der regionalen Sprachansprüche in Frankreich und weit darüber hinaus anerkannt und konsultiert wirst. Du bist nicht der Beste unter uns, wir sind alle gut (lächeln), du bist der Erste unter uns. Mögest du das noch lange bleiben.

Liebe Jacqueline, wir alle, die wir heute hier versammelt sind, um dir den Eugene-Philipps-Preis zu verleihen, danken dir besonders für den Teil der Weiblichkeit, den du in unseren Kampf eingebracht hast, insbesondere in der Zeit der Eröffnung der ersten ABCM-Zweisprachigkeit-Klassen, und für das Körnchen Salz, das du in unsere Debatten einzubringen vermagst, insbesondere bei den Konferenzen des elsässischen Kulturzentrums. Wir zählen heute und morgen auf dich.

Und schließlich danke ich Ihnen beiden für Ihre Sorge um die Weitergabe der Fackel und dafür, dass Ihr es bereits geschafft habt, einen Nachwuchs in unseren verschiedenen Gremien zu integrieren.

Pierre Klein, Präsident des Verbandes Alsace bilingue